Ajaccio: Addiction et polyconsommation un cocktail qui fait des ravages.

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Ajaccio
dimanche 24 janvier 2010
Addiction et polyconsommation un cocktail qui fait des ravages

Sur le front de la délinquance, les derniers éléments communiqués par la préfecture de Corse ne sont pas bons. L'année passée a notamment vu progresser les trafics et règlements de comptes entre petits caïds émergents sur fond de hausse des affaires de droit commun.

Les meurtres perpétrés au sein de la sphère privée, relatifs par exemple à des conflits sentimentaux exacerbés, et les différends liés à la consommation de stupéfiants ont augmenté de façon sensible, avec 17 affaires l'an dernier contre 11 en 2008.

Le boom des petits trafics locaux

Comme l'annonçait récemment le procureur de la République d'Ajaccio, Thomas Pison, lors du bilan annuel sur la délinquance, « il commence à y avoir beaucoup de petits trafics locaux, liés à la consommation de drogues de synthèse (1), de cannabis, d'héroïne et de cocaïne. Parfois, les stupéfiants font des mélanges explosifs. »

Comment expliquer cette montée des trafics de stupéfiants ? Quels sont les comportements addictifs les plus constatés ? Comment en arrive-t-on là ? Mal-être, culte de la performance ou simple envie d'être grisé, au début. Si le volet judiciaire apporte un éclairage sur l'ancrage de la drogue dans la cité impériale, le volet psychiatrique permet de comprendre les causes de cette dépendance et sa progression.

Pas grand-chose à attendre, en revanche, des numéros d'appel d'urgence, qui sont le plus souvent aux abonnés absents. « Points info écoute », « Accueil écoute des jeunes », « Écoute dépendance »... il est préférable de ne pas les composer si la situation est véritablement désespérée ! Le vendredi après-midi, l'urgence et l'écoute sont en RTT. Leur messagerie répond inlassablement : « Nous ne sommes pas là mais veuillez nous laisser un message... Nos bureaux sont fermés actuellement. » Pourtant les sites avaient l'air sérieux...

Moins de cocaïne mais plus de polytoxicomanies ici

Éminent spécialiste s'il en est, le Dr Charles Marcellesi, psychiatre, n'a pas son pareil pour évaluer le poids de la drogue, non seulement au niveau des addictions proprement dites, mais aussi sur la place que ce fléau occupe dans la société. « Le discours a changé. Il y a une nouvelle économie psychique davantage axée sur la jouissance de la vie. Je pars du principe qu'en toxicomanie les tendances changent tous les dix ans. La Corse a le même profil que les régions frontalières. Et à l'intérieur même de la Corse, on observe des disparités étonnantes entre Ajaccio et Bastia : pas au niveau des profils des consommateurs, mais au niveau des produits. À Bastia, c'est plutôt la cocaïne, tandis qu'à Ajaccio on voit davantage émerger des demandes de soins de personnes consommant des opiacés ou des polytoxicomanies. Notamment shit et cannabis, shit et alcool et aussi Lexomil à base de benzodiazépine (psychotrope). Les médicaments sont parfois détournés de leur usage... »

La difficile confrontation avec la vie réelle

Par son expérience du terrain, ce psychiatre qui a longtemps dirigé le centre de soins spécialisé en toxicomanie a pu constater que la période où les choses vont se révéler correspond au « début de la grande adolescence, et à l'âge adulte lorsque le sujet est obligé de gagner sa vie, lorsqu'il a été en situation d'échec scolaire, qu'il est confronté à la nécessité de se lancer sur le marché du travail. Il arrive alors qu'il plonge. On retrouve souvent, dans les cas d'addictions aux drogues, une « insécurisation » ressentie depuis l'enfance, liée à la séparation des parents. »

Pour ce spécialiste, le sentiment d'insécurité prédomine et serait l'une des causes premières de consommation de drogue. Bien évidemment, ce praticien n'écarte pas les autres causes de mal-être incitant le sujet à s'en remettre aux paradis artificiels. Il ne faut pas omettre les comportements festifs qui aboutissent au même résultat, d'abord de consommation, puis de dépendance à ces produits.

(1) Drogues de synthèse : amphétamines, ecstasy, héroïne, etc. Par opposition aux drogues naturelles, issues de plantes ou de champignons hallucinogènes.

Retrouvez la suite de cet article dans l'édition de Corse-Matin du 24 janvier ou sur le journal en ligne.

Lucile Caïtucoli-Ciattoni

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