Le cannabis diminue le QI, jusqu’à 8 points
Utiliser des preuves pour parler du cannabis
- Il existe peu de preuves scientifiques suggérant que le cannabis diminue l’intelligence générale telle que mesurée par le QI. Une seule étude (Meier et autres, 2012) est fréquemment citée pour appuyer la prétention que l’usage de cannabis est associé à un déclin du QI de 8 points. Baser toute affirmation générale sur une seule étude est problématique, surtout que la diminution de 8 points de QI n’a été constatée que chez un sous-ensemble très restreint de participants (38) représentant 3,7 % de l’échantillon total. De plus, une étude plus récente de ces mêmes données suggère que les conclusions établissant un lien entre l’usage de cannabis et le déclin du QI pourraient en réalité être le résultat de facteurs socioéconomiques non mesurés (Rogeberg, 2013).
- Fait intéressant, une étude plus récente (et plus vaste) a conclu que l’usage d’alcool était associé à des déclins du QI plutôt que l’usage de cannabis (Mokrysz et autres, 2014). Les scientifiques suggèrent également que l’usage de substance tôt, de façon générale, plutôt que l’usage de cannabis en particulier, peut mener à une diminution du QI. En résumé, les preuves que l’usage de cannabis est associé à un déclin du QI sont très faibles.
- Il faut souligner que différentes personnes sont affectées différemment par l’usage de cannabis. Les recherches qui suggèrent que consommer du cannabis peut avoir certains impacts sur le cerveau ne s’appliqueront pas à tous les utilisateurs dans toutes les situations.
Veuillez noter que cet extrait du guide d'intervention doit être lu en parallèle avec l'État de la preuve
État de la preuve
Au cours des dernières années, l’affirmation que la consommation de cannabis mène à un QI considérablement plus faible a été souvent répétée, en mentionnant parfois une baisse de 8 points. Une étude en particulier, par Meier et ses collègues (2012) est fréquemment citée comme preuve à l’appui (Meier et autres, 2012). La validité des conclusions de cette étude a cependant été remise en question et des preuves plus récentes suggèrent que l’usage d’autres substances pourrait avoir un plus grand impact sur le QI. En effet, un réexamen des données présentées par Meier et ses collègues, réalisé par Rogeberg (Rogeberg, 2013), suggère que l’association entre l’usage de cannabis et la baisse du QI peut s’expliquer par (c. à d. être confondu avec) le statut socioéconomique des participants plutôt que par l’usage de cannabis en soi.
L’article par Meier et ses collègues s’appuyait sur les données des participants de l’étude Dunedin, une enquête longitudinale qui a suivi une cohorte de personnes (n = 1 037) nées en 1972-1973 en Nouvelle-Zélande jusqu’à l’âge de 38 ans (Meier et autres, 2012). L’un des principaux résultats rapportés était qu’une « dépendance persistante au cannabis » était associée à un déclin dans la plupart des sous-tests de QI. En contraste, les personnes qui avaient commencé leur consommation de cannabis à l’âge adulte ne montraient pas la même baisse de QI. On rapportait également que cesser la consommation de cannabis « ne rétablissait pas entièrement le fonctionnement neuropsychologique » chez les utilisateurs persistants ayant commencé à l’adolescence. Bien qu’il s’agisse là de conclusions intrigantes, fonder des affirmations générales quant à l’impact de l’usage de cannabis sur le QI sur les résultats d’une seule étude – même une étude de cohorte prospective relativement bien conçue – est problématique, en particulier lorsque la prétention principale (c. à d. une baisse de 8 points du QI résultant de l’usage de cannabis) a été observée uniquement chez un très petit sous-échantillon (n = 38) ne représentant que 3,7 % de l’échantillon total.
En effet, les conclusions d’une étude de cohorte prospective plus récente incluant un échantillon plus vaste suggèrent une autre explication pour ces conclusions. Mokrysz et ses collègues ont examiné les résultats aux tests de QI chez les participants (nés en 1991-1992) à 8 ans et à 15 ans dans l’étude Avon de cohorte longitudinale de parents et d’enfants au Royaume-Uni (Mokrysz et autres, 2014). Parmi l’échantillon (n = 2 612, soit plus de deux fois la cohorte Dunedin), 24 % ont rapporté avoir consommé du cannabis au moins une fois à 15 ans ou avant. Même si ceux qui avaient consommé du cannabis plus de 100 fois ont vu un déclin considérable du QI de plus de 3 points comparativement à ceux qui n’en avaient jamais fait usage, cet effet disparaissait une fois d’autres facteurs clés (p.ex., le sexe, le statut socioéconomique et l’usage d’autres substances) pris en compte. De plus, la consommation d’alcool était associée à une baisse du QI et expliquait en fait la majorité de la variation dans les résultats de QI qui avait été associé à l’usage de cannabis (c. à d. que l’association entre le cannabis et la baisse du QI avait été confondue par la consommation d’alcool). Mokrysz et ses collègues ont conclu que l’âge lors de l’usage de substance, plutôt que la consommation de cannabis en soi, pouvait être responsable de moins bons résultats neuropsychologiques. Ces auteurs ont également affirmé ce qui suit (c’est nous qui soulignons) :
Les conclusions n’appuient pas l’hypothèse que l’usage du cannabis à l’adolescence mène à un déclin persistant du fonctionnement cognitif une fois les autres variables confusionnelles prises en compte. La conclusion qu’un usage modéré, mais non plus excessif, d’alcool a été associé avec le déclin du QI peut être reliée à un effet préjudiciable de la consommation d’alcool à l’adolescence justifiant un examen plus approfondi. (Mokrysz et autres, 2014)
Références
- Meier, M.H., Caspi, A., Ambler, A., Harrington, H., Houts, R., Keefe, R.S.E., McDonald, K., Ward, A., Poulton, R., Moffitt, T.E., 2012. Persistent cannabis users show neuropsychological decline from childhood to midlife. Proceedings of the National Academy of Sciences 109, E2657-E2664.
- Mokrysz, C., Gage, S., Landy, R., Munafò, M.R., Roiser, J.P., Curran, H.V., 2014. Neuropsychological and educational outcomes related to adolescent cannabis use, a prospective cohort study. European Neuropsychopharmacology 24, S695.
- Rogeberg, O., 2013. Correlations between cannabis use and IQ change in the Dunedin cohort are consistent with confounding from socioeconomic status. Proceedings of the National Academy of Sciences 110, 4251-4254.
Commentaires récents